Je m’intéresse depuis quelques années à l’art de la négociation qui peut s’avérer très utile dans de nombreuses situations. Que ce soit pour les relations au travail ou celles avec sa famille, savoir négocier peut être redoutable pour obtenir tout ce que l’on souhaite.
De nombreuses solutions pourraient être trouvées rapidement et beaucoup de problèmes d’entente pourraient être évités si chaque personne appliquait les 24 techniques que je vous présente ci-dessous.
Je ne parle pas de manipulation malintentionnée : il s’agit d’être convaincant en utilisant des méthodes qui devraient être la base de toute communication efficace. Par exemple, vous voulez gagner plus d’argent ? Pour cela, négociez avec brio votre nouveau salaire auprès de votre employeur (le résultat n’est évidemment pas garanti à chaque fois, mais vous allez mettre toutes les chances de votre côté).
1. Rester posé et calme
Parlez doucement et souriez. Avec un état d’esprit positif, on pense plus vite, on a plus de chances de collaborer et de résoudre des problèmes. La positivité engendre de l’agilité mentale chez nous et chez l’interlocuteur.
Les êtres humains veulent éviter le conflit et fuient la négativité : on doit s’entendre avec les membres de sa « tribu ». Avoir un regard positif inconditionnel rend possible un changement de pensées et de comportement (les hommes aiment les attitudes socialement constructives).
Employez une voix descendante, calme et lente (voix d’animateur de talk-show nocturne) : cela crée une aura d’autorité et de confiance.
Utilisez une voix positive/enjouée : elle devrait être la voix par défaut, car c’est celle d’une personne décontractée, de bonne composition. Il faut se détendre et sourire pour avoir une attitude légère et encourageante.
N’utilisez jamais la voix directe ou assurée : elle crée des problèmes (les gens se mettent sur la défensive) et du rejet.
2. Adopter une écoute active
La négociation doit être un processus de découverte : il s’agit de mettre à jour le plus d’informations possible, et pas de livrer bataille.
C’est celui qui écoute qui contrôle la situation, parce que l’autre révèle des informations nous permettant de diriger la conversation vers son but (on mobilise l’énergie de celui qui parle à ses propres fins).
Dirigez votre attention exclusivement sur l’autre personne et ce qu’elle a à dire : cela permet de chasser/calmer la petite voix dans notre tête et chez l’autre (moments de réflexion intenses), et donc d’être concentré + écouté en retour.
3. Poser des questions ouvertes et calibrées
Posez des questions exigeant une vraie réflexion de l’interlocuteur, ou demandant implicitement son aide et non une simple réponse de type Oui/Non : comment faire ? Qu’est-ce qui vous amène à faire cela ? Comment puis-je faire cela (une version adoucie du « non ») ?
Cette technique donne de bons résultats :
- Fait parler l’interlocuteur (pour avoir des informations utiles)
- Il reste engagé, cela va lui donner l’illusion du contrôle afin qu’il apporte lui-même NOTRE solution (il faut que l’autre partie soit persuadée que la solution que nous recherchons vienne d’elle-même : négocier dans leur monde).
- Permet d’éviter une négociation agressive et non constructive, émotionnelle et sans rationalité (moins direct)
- L’interlocuteur peut enchérir contre lui-même si nous lui demandons inlassablement « comment ? »
Ne posez pas de questions qui commencent par « Pourquoi », car c’est toujours une accusation, dans toutes les langues. Sauf si pour que l’interlocuteur défende un but qui nous serve.
4. Étiqueter
La technique de l’étiquetage en négociation consiste à annoncer à l’oral des faits. Par exemple : « on dirait que vous êtes prêt à prendre le risque de perdre un client », « on dirait que vous avez peur qu’on vous arnaque », « il semble que la situation soit critique », etc.
Cette méthode permet de faire passer un message sans agressivité, ou encore de nommer les choses pour dédramatiser une situation afin d’aller de l’avant. L’interlocuteur se sent écouté, considéré et compris.
Faites la liste des pires choses que la partie adverse peut penser de vous, et dites-les avant elle pour couper les dynamiques négatives. Les reproches ont souvent l’air exagérés à haute voix : les exprimer nous-mêmes encouragera l’autre personne à affirmer que c’est plutôt le contraire qui est vrai.
Mettez en pleine lumière les obstacles ou les influences négatives pour pouvoir les dégager. Les nier donne des raisons de ne pas trouver d’accord.
5. Utiliser l’empathie tactique
Il faut se mettre à place de l’autre même si on n’est pas d’accord avec ses idées : en reconnaissant sa situation, nous exprimons l’idée que nous sommes à l’écoute, et il peut révéler des informations utiles. C’est ce qu’on pourrait appeler une tactique/relation empathique.
Mettez un nom sur l’émotion de l’interlocuteur :
- « On dirait que vous êtes énervé. »
- « Il semble que vous soyez vexé. »
Cette façon de faire dédramatise la situation et calme. Poser des mots sur les peurs de l’interlocuteur atténue leur pouvoir. Cela interrompt l’action dans l’amygdale (la zone du cerveau qui produit la peur) et génère un sentiment de sécurité, de bien-être et de confiance. Il faut que l’interlocuteur se sente compris et apprécié.
6. Parler en miroir
Répétez une phrase ou un bout de phrase en reprenant les mots de l’interlocuteur (les 3 derniers mots ou les derniers mots importants). Cette astuce donne un sentiment de similitude et met en confiance pour obtenir des informations utiles sur la stratégie adverse, car nous craignons ce qui est différent et nous sommes attirés par ce qui est similaire (provoque de l’empathie).
Reformulez/Paraphrasez les dires de l’interlocuteur avec d’autres mots pour qu’il se sente compris, et dise « c’est vrai » (plus d’explications au point 13).
Cherchez ce qui motive l’interlocuteur et montrez que vous partagez les mêmes préoccupations (similarités culturelles). Cela provoque des concessions de la part de l’interlocuteur.
7. Marquer des pauses
Marquer des pauses permet à l’autre de se sentir écouté/compris, et nous donne en même temps l’opportunité de réfléchir.
Marquez une pause peut éviter les réactions émotionnelles d’énervement. Après avoir mis des mots sur un obstacle ou renvoyé en miroir une affirmation, laissez le temps agir. L’autre personne remplira le silence.
8. S’humaniser
Présentez-vous pour créer un lien apportant du respect : « Je m’appelle Adrien ».
Servez-vous de votre prénom pour être une « véritable personne » aux yeux de la partie adverse. L’humour et l’humanité sont les meilleures façons de briser la glace et de faire sauter les obstacles.
9. Dire le prénom de la personne
Nommez la personne pour créer un rapprochement. Cette technique toute simple peut la calmer en cas de besoin.
10. Faire un compliment
Ne soyez pas avare en compliments : l’interlocuteur se sent respecté et redevable.
11. Donner plus avec quelque chose d’insignifiant pour nous, mais important pour l’interlocuteur
La méthode est plutôt facile à cerner : dites par exemple « faites un effort sur le prix, vous gagnerez un client fidèle et je vous ferai en plus de la publicité en vous recommandant à tous mes contacts ».
12. Chercher à obtenir un « non » dès le départ
Chercher à obtenir un « non » dès le début de la négociation permet à l’interlocuteur d’avoir l’illusion de contrôle (il a pu dire non), pour ensuite négocier plus sereinement. Le « non » permet de se sentir en sécurité. Il signifie « attend » ou « je ne suis pas à l’aise avec ça ».
Le « non » définit l’espace de l’interlocuteur et lui apporte confiance et confort qui lui permettent de nous écouter. Pour être écouté, on peut même poser une question absurde en sachant qu’on nous répondra par la négative (en nommant volontairement mal une émotion ou un désir de l’interlocuteur).
Obtenir un « non » n’est pas la fin de la négociation, mais son commencement. Par contre, en cherchant le « oui », qui demande peu de réflexion, l’interlocuteur se met sur la défensive, car il se sent forcé, et attendra qu’on donne quelque chose en échange.
Concrètement, obtenir un « oui » est le but de la négociation, mais il ne faut pas le chercher dès le début parce que cela met l’interlocuteur sur ses gardes.
13. Chercher à obtenir un « c’est vrai », « c’est exact » ou « c’est cela »
Réussir à obtenir un « c’est vrai », « c’est exact » ou « c’est cela » signifie que l’interlocuteur est réellement d’accord avec nous et en bonne posture pour négocier, à l’inverse de « vous avez raison » qui est expéditif.
Utilisez des résumés en reformulant et paraphrasant pour provoquer un « c’est vrai ». Affirmez émotionnellement « le monde selon l’autre ».
14. Utiliser le mot « Juste »
« Juste » est un mot très puissant. Utilisez-le de la sorte : « Je veux être le plus juste possible avec vous… ».
Ne l’utilisez pas trop directement en disant par exemple « Je suis juste », car cela signifie que la position de l’autre est injuste.
Si quelqu’un l’utilise contre vous, ne faites pas de concession (c’est ce qu’il veut) et demandez plutôt en quoi on le traite injustement.
15. Jouer sur l’aversion à la perte
Les humains attachent plus d’importance à une perte qu’à un gain du même montant : nous prenons plus de risques pour éviter une perte que pour réaliser un gain.
Il faut que l’interlocuteur pense qu’il a quelque chose à perdre s’il n’agit pas. Pour recevoir une réponse garantie par e-mail notamment, faites donc une relance du type : « Avez-vous renoncé à ce projet ? ».
16. Découvrir les vraies attentes et motivations de l’interlocuteur
Toute négociation est définie par un réseau de désirs et de besoins souterrains. Il faut tout faire pour découvrir les vraies attentes et motivations de l’interlocuteur.
17. Ancrer pour négocier un prix
Modifiez la réalité de l’interlocuteur en ancrant son point de départ : avant de faire une offre, ancrez-le émotionnellement en lui expliquant à quel point celle-ci sera mauvaise, puis en jouant sur son aversion à la perte. Exemple : « J’ai une mauvaise proposition pour vous » … une pause pour qu’il demande de poursuive, puis « Quoi qu’il en soit, je vous parle de cette opportunité avant d’en parler à quelqu’un d’autre ».
Faites au départ un ancrage extrême, avec une proposition de prix très basse pour que l’offre réelle paraisse raisonnable (au départ 65 % de la somme voulue, puis 85 %, 95 % et enfin 100% de la somme voulue, selon le plan Ackerman).
Finissez par proposer un prix pas rond, après un petit temps de réflexion, pour faire croire qu’on est à notre maximum.
18. Ne pas couper la poire en deux
Il ne vaut mieux aucun accord qu’un mauvais accord. Le temps peut être un allié : ne prenez pas de décisions impulsives allant contre vos intérêts.
19. L’interlocuteur n’est pas toujours la personne à convaincre
Il y a peut-être une équipe en face de vous. Plus l’interlocuteur dit « je », « moi » et « mon », moins il y a de poids. Il faut s’intéresser aux autres. Exemple : « Qu’en pensent vos collaborateurs ? ». Il faut cerner les motivations des acteurs qui restent dans l’ombre. On peut par exemple demander comment le marché affectera les autres acteurs.
À l’inverse, plus il évoque les autres personnes avec les pronoms « nous », « eux » et « leur », plus il a de poids dans la négociation. Il s’agit d’un décideur expérimenté, qui maintient ses options ouvertes.
20. Utiliser la règle des 7-38-55 %
La communication est :
- 7 % verbale (le sens des mots)
- 38 % vocale (l’intonation)
- 55 % corporelle (visage et langage corporel)
Les incohérences entre les mots et les signaux non verbaux indiquent quand l’interlocuteur ment ou n’est pas à l’aise avec un accord : « je vous ai bien entendu dire « oui », mais on dirait qu’il y avait une hésitation dans votre voix ».
Soyez particulièrement attentif à la communication verbale et non verbale pendant les moments de relâchement, au début et à la fin de la session ou quand quelqu’un dit quelque chose qui sort du cadre.
21. Garder en tête la règle des 3 « oui »
Pour être certain de ne pas faire face à un « oui » contrefait, il faut avoir recours aux questions calibrées, aux résumés et aux étiquettes pour que l’interlocuteur réaffirme son accord au moins 3 fois. Il est difficile de mentir ou dissimuler la conviction de façon répétée.
22. Il faut bien se préparer
Pour éviter d’improviser : élaborez un but ambitieux et légitime, pour jouer avec les étiquettes et les questions calibrées afin d’obtenir les réponses utiles à votre objectif.
23. S’attendre à prendre des coups
Recevoir un ancrage extrême peut déstabiliser : il ne faut pas tomber dans le piège du compromis ou faire directement une offre maximum. Pour cela, préparez des tactiques d’esquive.
Il faut apprendre à prendre/rendre un coup sans colère, en fixant des limites : le problème n’est pas la personne en face de nous, mais la situation.
24. Trouver les cygnes noirs
Les cygnes noirs sont des informations inconnues qui peuvent totalement changer les cours d’une négociation et nous mener à des succès inespérés (ces informations peuvent être inconnues par l’interlocuteur lui-même, qui peut aussi ignorer leur utilité pour nous).
Pour cela, laissez-vous guider par ce que vous savez déjà, sans vous laisser aveugler par eux. Restez flexible.
3 leviers sont possibles grâce aux cygnes noirs :
- positif : la capacité à donner à quelqu’un ce qu’il veut
- négatif : la capacité à faire du mal à quelqu’un
- normatif : se servir des normes de l’interlocuteur pour le convaincre
Pour trouver les cygnes noirs : faites en sorte de comprendre la « religion » de l’interlocuteur. Pour entrer dans sa vision du monde, il faut sortir de la table des négociations et entrer dans sa vie, notamment émotionnelle : c’est là que résident les cygnes noirs.
Écoutez attentivement et vérifiez 2 fois, car on n’entend pas tout la première fois. Comparez avec des collègues qui peuvent avoir entendu des choses qu’on aurait ratées.
Complément d’information et conclusion
3 types d’interlocuteurs
Il existe 3 types d’interlocuteurs : analyste (temps = réflexion), arrangeur (temps = relation) et assertif (temps = argent). Parvenir à déterminer votre type et celui de votre interlocuteur peut s’avérer profitable durant la négociation.
Si quelqu’un semble irrationnel/fou
Il est très probable qu’il ne le soit pas… recherchez ses contraintes, ses désirs cachés et traquez les mauvaises informations.
Pour conclure, sachez que vous pouvez retrouver toutes ces techniques détaillées et de nombreuses anecdotes dans le livre Ne coupez jamais la poire en deux. Je vous le recommande vivement, car il est l’une de mes sources d’inspirations préférées dans l’art de la négociation.
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